Laboratoire d'archéologie du Québec
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Plat à aile ou jatte. Vue généraleImage
Photo : Mathieu Landry 2023, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Plat à aile ou jatte. Côté AImage
Photo : Mathieu Landry 2023, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Plat à aile ou jatte. Côté BImage
Photo : Mathieu Landry 2023, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Plat à aile ou jatte. Côté CImage
Photo : Mathieu Landry 2023, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Plat à aile ou jatte. Vue de dessusImage
Photo : Mathieu Landry 2023, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Plat à aile ou jatte. Vue de dessousImage
Photo : Mathieu Landry 2023, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Plat à aile ou jatte. Détail du décorImage
Photo : Mathieu Landry 2023, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Plat à aile ou jatte. Détail d'une altération de cuissonImage
Photo : Mathieu Landry 2023, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

BkFg-6 > Couche stratigraphique 4 > Numéro de catalogue 12

Contexte(s) archéologique(s)

Dépotoir
Remblai

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

Le plat à aile ou jatte a été sélectionné pour la collection archéologique de référence du Québec, car son état de « biscuit » témoigne du processus de production d'une pièce en terre cuite grossière d'origine locale. Il a également été choisi parce qu'il s'agit d'un exemple de production céramique réalisée à partir du dernier quart du XVIIIe siècle au Québec. De plus, cet objet témoigne de la production de l'atelier Jean-Baptiste II Maillet et Fils, en activité de 1828 à 1853 à Saint-Denis-sur-Richelieu.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

Le plat à aile ou jatte en terre cuite grossière d'origine locale est façonné entre 1828 et 1853 à l'atelier Jean-Baptiste Maillet II et Fils, maître-potier, à Saint-Denis-sur-Richelieu. Le plat à aile ou jatte est un récipient principalement utilisé pour la préparation, le service et la consommation d'aliments. Il peut aussi servir à d'autres usages.

L'argile employée pour la fabrication de l'objet est tout d'abord extraite du terrain du potier puis est soumise à l'étape de correction. Elle est homogénéisée et mise en portions selon le poids désiré. Une balle d'argile est formée, puis jetée au centre de la girelle du tour que le potier met en mouvement. À l'aide de la force centrifuge et de la pression des mains, il entreprend l'ébauchage de l'objet : la balle est centrée, percée, ouverte, puis le potier procède à la montée des parois de la pièce et à son évasement pour lui donner forme. Le rebord est façonné et les parois sont lissées, puis la pièce est détachée de la girelle à l'aide d'un fil séparateur et mise à sécher. Le potier exécute le décor à l'engobe sur l'objet à l'état cuir, une pâte encore humide gardant sa forme sous une légère pression. Une première cuisson est réalisée dans un four alimenté continuellement de bois pendant plusieurs heures, puis la pièce est inspectée. Son état de biscuit indique que son processus de fabrication était terminé et qu'il a été rejeté avec d'autres objets défectueux.

Ce plat à aile ou jatte est représentatif des changements survenus vers 1775 dans les méthodes de fabrication et de décoration des terres cuites grossières au Québec, où la double cuisson et les décors à l'engobe font leur apparition. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, les potiers québécois ont recours principalement à la monocuisson pour réaliser simultanément la cuisson du corps céramique et la vitrification de la glaçure de leur production qui ne sont généralement pas décorées. À partir du troisième quart du XVIIIe siècle, la double cuisson commence à être employée, devenant presque la norme au XIXe siècle au Québec. Cette méthode consiste à cuire une première fois les contenants qui sont parfois décorés à l'engobe afin de produire le biscuit. Le potier applique ensuite la glaçure, et une seconde cuisson est réalisée. La double cuisson a l'avantage d'économiser la quantité de glaçure et de réduire le nombre d'objets affaissés, et donc de ratés, lors de la cuisson. Cependant, cette technique demande plus d'énergie et de combustible que la cuisson simple. Les décors à l'engobe composés de lignes horizontales et sinusoïdales comme ceux de cet objet semblent apparaitre au Québec à la fin du XVIIIe siècle. Les potiers de Saint-Denis-sur-Richelieu, d'où provient l'objet, sont reconnus pour leur grande production de contenants ornés avec ce type de décor. D'autres potiers décorent leurs productions d'une manière similaire, dont l'atelier des frères Poitras (1797-1842) de Québec. Ce style est vraisemblablement introduit en Amérique du Nord au cours de la première moitié du XVIIIe siècle par des artisans potiers allemands établis aux États-Unis.

Le plat à aile ou jatte a été mis au jour sur un site associé à l'atelier de Jean-Baptiste II Maillet et Fils, à Saint-Denis-sur-Richelieu. En 1768, les premiers potiers viennent s'établir à Saint-Denis. Ce n'est qu'après l'établissement en 1776 du maître potier d'origine acadienne Simon Thibodeau que la région de Saint-Denis-sur-Richelieu devient la région la plus importante dans la production artisanale de terre cuite grossière au Québec jusque dans les années 1830. Le métier de potier à l'époque est une tradition familiale : le maître-potier Jean-Baptiste II Maillet provient d'une famille de potiers comptant minimalement onze potiers en trois générations. Les potiers de son atelier exercent leur métier sur ce site de 1828 à 1853. L'objet provient d'un remblai trouvé sous la rue Morin contenant plusieurs rebuts de cuisson de terrines, de plats, de jarres et de cruches.

Élément(s) associé(s)

RÉFÉRENCES

GATES ST-PIERRE, Christian et Yves MONETTE. Feu : Lueurs et fureurs. Archéologie du Québec. Montréal, Pointe-à-Callière, cité d'archéologie et d'histoire de Montréal/Les Éditions de l'Homme, 2022. 199 p.
GAUMOND, Michel et Paul-Louis MARTIN. Les maîtres-potiers du bourg Saint-Denis, 1785-1888. Cahiers du patrimoine, 9. Québec, Centre de documentation, Direction de l'inventaire des biens culturels, 1978. 180 p.
HAMEL, Dany. Les modes de fabrication des terres cuites communes de production locale à Québec à la fin du XVIIe siècle. Cahiers d'archéologie du CÉLAT, 27. Québec, CÉLAT, 2009. s.p.
LANGLOIS, Jacques. Répertoire des artisans-potiers québécois, 1655-1916. Dossier, 37. Québec, Ministère des affaires culturelles, Direction générale du patrimoine, 1978. 175 p.
MÉTREAU, Laetitia, dir. Identifier la céramique au Québec. Cahiers d'archéologie du CÉLAT, 41. Québec, CÉLAT, 2016. s.p.
MONETTE, Yves. Les productions céramiques du Québec méridional, c. 1680-1890. BAR International Series. Archaeopress, Oxford, 2006. 128 p.