La tasse jouet a été sélectionnée pour la collection archéologique de référence du Québec, car elle représente une catégorie d'objets reliée à l'enfance, celle des services à thé jouet, en raison de son format et de son décor imprimé. Elle a également été sélectionnée parce qu'elle provient d'un contexte domestique dans lequel des fragments d'assiettes jouets ont aussi été mis au jour. Ces pièces pourraient avoir été utilisées au sein d'un même service à thé jouet.

La tasse jouet est fabriquée au Royaume-Uni, peut-être en Angleterre, après 1820 et est ensuite importée dans la colonie du Bas-Canada. De forme cylindrique, la tasse en terre cuite fine blanche présente un rebord droit dont l'extrémité est arrondie ainsi qu'un talon droit et un pied légèrement convexe. Le fond est plat en retrait. L'anse est appliquée et ses extrémités, repliées vers le bas, sont ornées d'un motif végétal moulé. Une scène est imprimée en bleu sur la paroi.

La taille de la tasse, qui mesure 4,4 cm de hauteur, suggère qu'elle est utilisée comme jouet plutôt que comme tasse d'enfant. Il semble en effet que les tasses d'enfant, du moins celles au sein de collections privées, mesurent rarement moins de cinq centimètres de hauteur, leur taille habituelle se situant davantage entre six et huit centimètres. Cette tasse jouet est probablement un élément d'un service à thé miniature complet utilisé par les enfants et généralement associé aux jeux de poupées. Au XIXe siècle, il existe dans les livres sur l'étiquette des règles concernant les jeux de poupées, les jeunes filles enseignant à leur tour ces bonnes manières à leurs poupées dans le cadre de leurs jeux. La vaisselle jouet reprend généralement les mêmes formes et décors que celle des adultes, et peuvent également porter des décors identiques ou du moins similaires à la vaisselle pour enfant (thèmes animaliers, scènes familiales ou avec jeux d'enfants). La taille de cette tasse, d'un format supérieur aux autres objets utilisés dans les services pour poupées, suggère également qu'elle pourrait être utilisée de manière plus fonctionnelle pour consommer des breuvages non alcoolisés dans le cadre de jeux de fillettes, ces dernières pouvant alors reproduire avec leurs poupées ou d'autres enfants des scènes observées chez les adultes.

L'essor de la fabrication de vaisselle pour enfant au début du XIXe siècle coïncide avec l'emploi de nouvelles techniques de fabrication. Alors qu'avant, les matériaux et les décors rencontrés suggèrent que les objets destinés aux enfants pouvaient être des objets démontrant un certain luxe, la production de masse de la céramique permet d'offrir des objets plus abordables et de développer un marché ciblant les enfants. La production de ce type de vaisselle reste toutefois une production considérée plus bas de gamme au sein des fabriques et porte rarement des marques de fabricants.

La tasse jouet est mise au jour en 1990 sur le site du Manoir Madeleine de Verchères, situé à Sainte-Anne-de-la-Pérade. La seigneurie de Sainte-Anne est concédée à la fin du XVIIe siècle et le manoir actuel est construit par la famille Tarieu de Lanaudière vers 1765. La famille n'occupe pas la résidence à l'année, mais y maintient du personnel pour l'entretien du domaine. En 1819, le fonctionnaire, militaire et homme politique John Hale (1765-1838) acquiert le domaine qu'il occupe avec sa famille tout au long de la belle saison, retournant à Québec l'hiver. La famille Hale en reste propriétaire jusqu'en 1865.

La tasse jouet est jetée dans un puisard réutilisé en fosse à déchets. Les artéfacts qui y ont été retrouvés ont probablement été jetés lors d'un même évènement, entre 1825 et 1850, lors d'un ménage où des objets désuets ou dépareillés auraient pu être mis au rebut. L'assemblage compte aussi des fragments de deux ou trois assiettes jouets de même facture, bien que les décors illustrent des scènes différentes. Les artéfacts mis au jour dans le puisard comptent aussi des pièces datant du début du XIXe siècle, voire de la fin du XVIIIe siècle. La plupart des artéfacts du dépôt sont complets et les bris observés peuvent avoir été causés par la pelle mécanique utilisée lors de l'intervention archéologique.