Montréal

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La cuvette de toilettes a été sélectionnée pour la collection archéologique de référence du Québec, car elle a été retrouvée sur le site archéologique du Marché-Sainte-Anne-et-du-Parlement-du-Canada-Uni dans un contexte daté entre 1844 et 1849. Elle a également été choisie parce qu'elle constitue une innovation technologique rarement documentée en contexte archéologique.

La cuvette de toilettes en terre cuite fine blanche vitrifiée est produite par la compagnie Josiah Wedgwood and Sons Limited, établie dans le Staffordshire en Angleterre depuis 1759. Ce modèle de toilettes est introduit au début du XIXe siècle et apparait dans un catalogue publié en 1803 par la compagnie. Il s'agit du modèle no 1388, d'après l'inscription visible sur le rebord de la cuvette.

La cuvette de toilettes est une composante d'un appareil sanitaire servant à recueillir et à évacuer les excréments vers les égouts. Ce système est composé d'une grande plaque de métal séparant la cuvette en céramique de deux réceptacles, dont le dernier, en cuivre, est relié à un tuyau d'évacuation. Le passage des résidus de l'un à l'autre se fait par une valve activée à l'aide d'une chasse d'eau mécanique avec un pommeau au niveau de la cuvette. La chasse est reliée de la cuvette à un réservoir d'eau en hauteur permettant de faciliter l'évacuation vers les égouts et la gestion des odeurs.

La cuvette de toilettes est mise au jour en 2013 sur le site archéologique du Marché-Sainte-Anne-et-du-Parlement-du-Canada-Uni, situé à Montréal. Afin d'apaiser les tensions causées par la révolte des Patriotes de 1837-1838, Lord Durham (1792-1840), gouverneur général de l'Amérique du Nord britannique et commissaire enquêteur, propose l'union du Haut et du Bas-Canada. L'acte d'union est adopté en juillet 1840, et Kingston est désignée première capitale de la province du Canada. Dès 1843, cette fonction est déménagée à Montréal, étant une métropole commerciale bilingue et géographiquement bien placée entre les deux provinces. Le Parlement est alors installé dans le marché Sainte-Anne, construit en 1834 et le plus moderne et l'un des plus prestigieux bâtiments montréalais. Ce dernier est rénové dès mars 1844, puis le Parlement accueille les premiers débats peu après. Débattues depuis février 1849, les mesures devant dédommager les victimes de l'armée pendant les rébellions ravivent les tensions. Accueillie le 25 avril 1849, la Loi sur l'indemnisation éveille la fureur de la population et une large foule vient manifester autour du Parlement le soir même, incendiant le bâtiment et bloquant l'accès aux pompiers. Les ruines du Parlement, qui s'est écroulé sous les flammes, sont ensevelies, et le siège est déménagé à Toronto.

L'objet a été retrouvé dans les décombres de l'aile nord-ouest. Cette partie du bâtiment comprenait des appartements au sous-sol, tandis que le rez-de-chaussée accueillait de nombreux bureaux. Au premier étage se trouvaient la Chambre de l'Assemblée législative, les bureaux du président et du greffier (garde-robe) ainsi que le fumoir. Cet objet s'ajoute à un corpus important d'artéfacts liés à l'hygiène qui a été mis au jour dans les contextes du Parlement. Au XIXe siècle, Montréal, toujours dépendante des fosses d'aisances et des latrines en arrière-cour, est encore aux prises avec des épidémies de choléra et de typhus. La construction du collecteur William en 1832-1833 sous le bâtiment du marché Sainte-Anne constitue le premier système de drainage des eaux usées de la ville. Prévue dans l'estimation des travaux de 1844, l'installation au parlement de quinze toilettes à chasse d'eau avec tuyau en fonte et citernes (self-acting water closet) est une innovation hygiénique majeure. Ces toilettes sont identifiées à trois endroits, dont la plus grande concentration se trouve dans l'aile nord-ouest, mais aussi dans le corps central nord et l'aile sud-est du Parlement. Cet aménagement à la fine pointe de la technologie démontre le caractère exceptionnel de ce bâtiment et témoigne d'une amélioration des conditions d'hygiène et d'un haut niveau de confort pour les parlementaires et les usagers de l'édifice.