La prothèse dentaire a été sélectionnée pour la collection archéologique de référence du Québec, car elle représente un témoin archéologique exceptionnel de l'usage de ce type d'objet par un enfant. Elle a également été choisie parce qu'elle témoigne des innovations technologiques du XIXe siècle dans le domaine de la dentisterie.

La prothèse dentaire est fabriquée au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle. Le lieu de sa production demeure incertain. Le processus de vulcanisation est découvert par Charles Goodyear en 1839, et est associé peu après à la fabrication de prothèses dentaires avec la Goodyear Dental Vulcanite Company fondée en 1864. L'Angleterre produit également de la vulcanite à partir de 1843. Il est donc probable que le caoutchouc soit fabriqué aux États-Unis ou en Europe, et que la prothèse soit produite au Canada afin de l'ajuster aux besoins du patient.

La prothèse dentaire est issue d'une fabrication artisanale. Elle est fabriquée à partir de l'empreinte en plâtre réalisée auparavant par un dentiste dans la bouche du patient. Avec cette empreinte, un prothésiste dans un laboratoire ajoute sur ce modèle en plâtre les dents en céramique et les crochets. Une maquette en cire est ensuite fabriquée d'après ce modèle et sert à la fabrication d'un moule en plâtre en deux parties. Ce nouveau moule en plâtre est disposé dans un support qui, une fois ébouillanté, fait fondre la cire. Le vide ainsi créé est ensuite remplacé à chaud par de la vulcanite, un caoutchouc auquel on a incorporé du soufre par vulcanisation. Cette étape se nomme le bourrage. L'armature de métal, les dents en céramique et les crochets sont également installés à ce moment. Le tout, avec le moule en plâtre, est enfermé dans un support qui est mis sous presse. Tout excédent, s'il y a lieu, est enlevé. L'étape finale de la préparation de la prothèse est la cuisson dans un vulcanisateur, sorte de marmite à vapeur d'eau, qui consiste en une cuisson longue sous haute pression. Cette étape permet de fixer le tout et de durcir le caoutchouc. Une fois durcie, la prothèse est grattée ou dégrossie, puis polie.

La prothèse dentaire est un appareil amovible permettant de remplacer une ou plusieurs dents dans le but d'améliorer la phonétique, la mastication, ainsi que l'esthétique. Cette prothèse, ne comportant que quelques dents, est partielle. Les crochets permettant de l'attacher la rendent amovible. Par ailleurs, puisqu'elle est de petit format, qu'elle imite des dents de lait et qu'elle comporte sept petits emplacements pour des dents naturelles, elle est probablement conçue pour être portée par un enfant en dentition primaire. En effet, d'après les dents reproduites et les âges auxquels les enfants perdent généralement ces dents, il est possible d'estimer que le propriétaire de cette prothèse avait au maximum entre 7 et 8 ans. L'ajout ultérieur de la canine, attesté par la couleur plus pâle et vive du caoutchouc qui la fixe, permet de penser que l'enfant a porté la prothèse jusqu'à environ 9 ou 10 ans au maximum.

Il parait inusité qu'un tel appareil ait été fabriqué pour un enfant qui ne pouvait le porter que pour un temps limité, étant donné la croissance normale de l'ossature. Il est possible que les parents de l'enfant, qui souffrait probablement de problèmes de santé dentaire, aient souhaité lui redonner une certaine dignité. Il n'est pas impossible, cependant, que la prothèse dentaire soit plutôt attribuée à un adulte ayant un retard de croissance qui affecte la maturation osseuse, mais cette condition est rare.

La prothèse dentaire est mise au jour le 20 ou 21 septembre 2012 sur le site patrimonial du Monastère-des-Augustines-de-l'Hôtel-Dieu-de-Québec, à Québec. Elle est retrouvée dans un drain localisé sous la salle actuelle du tour du monastère. Ce drain, consistant en un tuyau en grès, devait permettre l'évacuation des eaux usées et déchets en provenance de l'hôpital au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle. L'objet est recouvert d'un résidu indéterminé, probablement causé par son séjour dans le drain.