L'armature de carcasse incendiaire a été sélectionnée pour la collection archéologique de référence du Québec, car elle est liée au siège du fort de l'Île-aux-Noix de 1760 et qu'elle représente l'une des variétés de projectiles utilisés au XVIIIe siècle.

L'armature de carcasse incendiaire en fer forgé est possiblement fabriquée en Angleterre ou en Nouvelle-Angleterre lors de la seconde moitié du XVIIIe siècle. L'objet en fer forgé est de forme oblongue et se compose de quatre bandes verticales maintenues par une cinquième bande horizontale. Le tout est complété par deux calottes rivetées à la base et au sommet de l'objet. La calotte supérieure porte les traces d'anciens anneaux brisés et est percée de quelques ouvertures circulaires.

La carcasse incendiaire est un projectile d'artillerie peu précis conçu pour s'enflammer et causer des dommages sur des surfaces étendues. Elle est composée d'une armature de fer couverte d'une toile empesée, c'est-à-dire enduite d'une colle à base d'amidon. Le tout est ensuite rempli d'un mélange de substances hautement inflammables, telles que de la poudre à canon, du goudron, du salpêtre, du soufre, de la térébenthine, du suif et de l'huile de lin. Parfois, des canons de pistolets chargés et pointant vers l'extérieur de la carcasse sont ajoutés, ou encore des grenades remplies de poudre. Des mèches sont ensuite insérées dans la carcasse. Pour finir, celle-ci est badigeonnée de mastic composé de résine, de goudron, de cire d'abeille et de suif, puis est couverte de sciure de bois pour rendre le projectile moins collant. Le projectile est ensuite tiré par des mortiers par-dessus des ouvrages défensifs. Ces carcasses mettaient entre 3 et 11 minutes à se consumer.

L'armature de carcasse incendiaire est mise au jour sur le site du fort de l'Île-aux-Noix, situé sur la rivière Richelieu proche du lac Champlain. Tôt en 1759, les troupes françaises entreprennent la construction d'un fort de campagne sur cette île. L'érection de ce fort a pour but de maintenir autant d'hommes que possible entre les armées britanniques postées dans la région de Lake George et Montréal, afin de ralentir l'avancée des troupes ennemies. L'objectif était aussi de faciliter le ravitaillement des postes situés autour du lac Champlain. Après la campagne militaire de 1759, les frontières de la Nouvelle-France se resserrent drastiquement autour de Montréal. Pendant l'année, le fort Carillon (Ticonderoga) et le fort Saint-Frédéric (actuellement situé à Crown-Point dans l'État de New York) sont pris par les troupes britanniques, alors que les militaires français battent en retraite au fort de l'Île-aux-Noix. L'été suivant, soit le 16 août 1760, ce poste est abandonné après un siège de huit jours et les troupes françaises se replient sur Montréal après avoir incendié les postes de Saint-Jean, de Sainte-Thérèse et de Chambly, ceci afin d'éviter qu'ils ne tombent aux mains de l'ennemi. Le fort français de l'Île-aux-Noix se trouve aujourd'hui sous les nombreux vestiges de forts britanniques qui se sont succédé sur l'île après la Conquête, dont le fort Lennox, toujours debout aujourd'hui.

Ce projectile, trouvé sur l'île, a probablement été tiré sur le fort par les troupes britanniques lors du siège de 1760. De plus, les Français ont abandonné ce type de carcasse oblongue dans les années 1740 au profit des bombes, plus efficaces et moins coûteuses.