Laboratoire d'archéologie du Québec
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Tibia de porcin. Côté AImage
Photo : Joey Leblanc 2018, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Tibia de porcin. Côté BImage
Photo : Joey Leblanc 2018, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal
Tibia de porcin. Détail de la cassureImage
Photo : Joey Leblanc 2018, Creative Commons 4.0 (by-nc-nd) Pointe-à-Callière, Cité d'archéologie et d'histoire de Montréal

LOCALISATION

PROVENANCE ARCHÉOLOGIQUE+

Provenance archéologique

EdBt-3 > Numéro de catalogue 5520

Région administrative

Côte-Nord

MRC

Le Golfe-du-Saint-Laurent

Municipalité

Côte-Nord-du-Golfe-du-Saint-Laurent

Fonction du site

domestique
pêche

ÉVALUATION D'INVENTAIRE+

Le tibia de porcin fait partie de la collection archéologique de référence du Québec parce qu'il s'agit d'un exemple de viande faisant partie des provisions apportées et consommées par les pêcheurs basques venus au Canada durant le XVIe et le début du XVIIe siècle.

SYNTHÈSES ET RÉFÉRENCES+

Synthèse historique

Le tibia de porcin provient vraisemblablement de provisions de porc confit ou de porc en saumure apportées sur un baleinier ou un navire de pêche basque pour nourrir l'équipage, au cours du XVIe ou au début du XVIIe siècle. Il s'agit d'un tibia gauche presque complet d'un animal qui porte plusieurs marques de boucherie : l'os a été coupé ou scié à son extrémité proximale – ou supérieure – et fracturé à l'état frais à son extrémité distale – ou inférieure – avant la mise en saumure et la cuisson. La viande est consommée par les pêcheurs à bord du navire ancré dans l'anse du Petit Mécatina et les os restants sont jetés par-dessus bord avec d'autres déchets. Sur la terre ferme, très peu d'ossements d'animaux se sont conservés et les os mis au jour datent la plupart du temps de périodes d'occupation du site plus tardives.

L'avitaillement des baleiniers et des navires de pêche basques de l'époque prévoit suffisamment de provisions pour nourrir l'équipage pendant toute la durée du voyage de pêche, qui peut s'étaler sur plusieurs mois. Mais en raison des besoins de conservation à long terme, les provisions comportent avant tout des denrées sèches ou des aliments en saumure. Elles comprennent surtout du biscuit, du pain très sec soumis à une longue cuisson, de la viande comme le boeuf et le porc en saumure, du poisson salé ou séché comme la morue ou les sardines, des fèves et des pois secs, de l'huile ou du beurre, du vinaigre, des graines de moutarde et du sel. Il peut y avoir de la farine, du pain frais et de l'ail ainsi que des provisions de bouche personnelles apportées par l'équipage, tels du fromage, des raisins, des amandes, du vin ou d'autres aliments. Les fouilles révèlent aussi la présence de coquilles de noix de Grenoble et de noisettes, des noyaux de prunes et de cerises parmi les restes alimentaires jetés sur les lieux de pêche. Pour boire, il y a du vin, du cidre et de l'eau. L'eau, cependant, ne peut généralement pas se conserver à long terme.

Après plusieurs semaines, voire plusieurs mois, d'un régime alimentaire somme toute très limité, monotone et plutôt sec et très salé, les membres de l'équipage des navires apprécient la nourriture fraîche devenue accessible. Ils pratiquent la chasse au gibier, aux oiseaux, à la petite faune terrestre et même aux mammifères marins, ainsi que la pêche de poissons autres que la morue. Les ossements identifiés sur le site proviennent d'une grande variété d'espèces. Des cendrées ou chevrotines et des balles fabriquées sur les bateaux sont aussi trouvées sur le site. Selon le lieu de pêche et la saison, la cueillette de fruits locaux, d'oeufs d'oiseaux ou de coquillages peut ajouter du goût et de la variété au menu.

Le tibia de porc est trouvé en 2011 dans un sondage subaquatique situé au sud d'un grand monticule de pierres de lest, SP-5, dans l'anse du Petit Mécatina. Il semble que malgré leur arrivée au port de destination et leurs nombreuses activités de chasse, les pêcheurs continuent à consommer la viande apportée d'Europe. Plusieurs autres tibias de porc sont mis au jour à Petit Mécatina, ce qui laisse supposer que le jarret de porc était probablement la partie préférée de l'animal conservée en confit ou en saumure. Les traces de dents de rongeur observées sur l'os pourraient indiquer que ceux-ci avaient accès à la viande de porc durant son entreposage à bord du navire. La présence de rats à bord des navires est bien connue. Par contre, aucun os de rongeur tel le rat n'est identifié dans la collection de Petit Mécatina.

Le fragment d'os se trouve mêlé à quelques autres restes alimentaires, dont des os d'oiseaux et de mammifères, quelques os de morue, des tessons de marmite à fond arrondi, un pot à anse de fabrication basque et des fragments de cruchons en majolique espagnole.

Des analyses ostéologiques des restes fauniques retrouvés sur le site sont réalisées en 2014 permettant notamment d'identifier les espèces animales exploitées.

RÉFÉRENCES

BARKHAM, Michael M. « Aspects de la vie à bord des navires basques espagnols au XVIe siècle, notamment par référence aux expéditions de pêche de la baleine dans les eaux de Terranova ». BERNIER, Marc-André, Robert GRENIER et Willis STEVENS. L'archéologie subaquatique de Red Bay : la construction navale et la pêche de la baleine basques au XVIe siècle. Ottawa, Parcs Canada, 2007, p. 49-72.
DICKNER, Denis et Laurier TURGEON. « Contraintes et choix alimentaires d'un groupe d'appartenance : les marins-pêcheurs français à Terre-Neuve au XVIe siècle ». Canadian Folklore Canadien. Vol. 12, no 2 (1990), p. 53-68.
FITZHUGH, William W. The Gateways Project 2011. Land and Underwater Excavations at Hare Harbor, Mécatina. Rapport de recherche archéologique [document inédit], Artic Studies Center/Smithsonian Institution, 2012. 147 p.
Ostéothèque de Montréal et Claire ST-GERMAIN. « Analyse des restes fauniques du site Petit Mécatina 3/Hare Harbor 1 (EdBt-3), Basse-Côte-Nord, Québec, Canada (saisons de fouilles 2003 à 2012) et Rapport synthèse des saisons de fouilles 2001 à 2012 ». FITZHUGH, William W. et Erik PHANEUF. The Gateways Project 2013. Land and Underwater Excavations at Hare Harbour and Brador. Rapport de recherche archéologique [document inédit], Smithsonian Institution/Université de Montréal/Artic Studies Center, 2014, p. 223-263.
PROULX, Jean-Pierre. « Les méthodes, la technologie et l'organisation asques de la pêche de la baleine au XVIe siècle ». BERNIER, Marc-André, Robert GRENIER et Willis STEVENS. L'archéologie subaquatique de Red Bay : la construction navale et la pêche de la baleine basques au XVIe siècle. Ottawa, Parcs Canada, 2007, p. 44-100.